Madame Gaëlle Fruy soutiendra publiquement sa thèse
pour l’obtention du grade de doctorat en sciences juridiques
le jeudi 11 décembre à 16h dans la Salle des examens
La thèse s’intitule :
L’autonomie décisionnelle des consommateurs
à l’ère des technologies d’exploitation comportementale
Analyse de ses conditions d’effectivité en droits européen et belge de la consommation
Les membres du jury sont :
– Prof. et Doyen de la Faculté de droit, Nicolas Bernard, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles, président du jury
– Prof. Catherine Delforge, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles, co-promotrice et secrétaire du jury
– Prof. Alain Strowel, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles et UCLouvain, co-promoteur
– Prof. Anne-Christine Fornage, Université de Lausanne,évaluatrice externe
– Prof. Vincent Gautrais, Université de Montréal, membre du comité d’accompagnement
– Prof. Evelyne Terryn, KULeuven, membre du comité d’accompagnement
Résumé
Si la révolution industrielle a produit des machines dispensant les êtres humains de certains efforts physiques, la révolution numérique, accélérée par le développement des systèmes d’intelligence artificielle, permet désormais une dispense d’efforts intellectuels. La thèse part du constat que celle-ci impacte également le processus de décision de consommation. En effet, les consommateurs du 21ème siècle peuvent compter sur des objets connectés, équipés de systèmes d’intelligence artificielle, ainsi que sur des assistants virtuels pour s’informer, recevoir des recommandations d’achats, voire déléguer tout ou partie de leurs décisions de consommation.
La thèse suggère que cette évolution est notamment le résultat de l’exploitation du comportement humain, elle-même rendue possible grâce au développement combiné des technologies numériques émergentes ainsi que des avancées en sciences comportementales et en neurosciences. Elle s’interroge sur les conséquences d’une telle exploitation et pose la question de savoir si et comment les législations européennes et belges protègent encore effectivement la faculté des consommateurs de prendre des décisions de consommation par eux-mêmes et pour eux-mêmes.
Dans cette perspective, la recherche met en évidence les insuffisances des notions classiques pour saisir les risques engendrés par les technologies d’exploitation comportementale. La thèse plaide en faveur de la réception d’un nouveau concept, celui de l’autonomie décisionnelle, qui conduit à interroger sous un angle original certaines fictions juridiques au fondement de notre système juridique, telles que la volonté et la capacité. Le concept offre également un cadre de réflexion, structurant et englobant, permettant d’appréhender de façon cohérente les enjeux contemporains de la protection des consommateurs.
Abstract
While the Industrial Revolution gave rise to machines that alleviated human physical labor, the Digital Revolution –now accelerated by the development of artificial intelligence systems–extends this relief to intellectual effort. The thesis begins by noting that this shift also affects the consumer decision-making process. Indeed, 21st-century consumers can rely on connected devices equipped with AI systems, as well as virtual assistants, to gather information, receive purchase recommendations, and even delegate part – or all – their consumption decisions.
The thesis argues that this evolution results in part from the exploitation of human behavior, enabled by the combined development of emerging digital technologies and advances in behavioral sciences and neuroscience. It interrogates the consequences of such exploitation and asks whether –and to what extent– European and Belgian legislations still effectively protect consumers’ ability to make consumption decisions by themselves and for themselves. From this perspective, the research highlights the shortcomings of classical legal notions in addressing the risks posed by behavioral exploitation technologies. The thesis advocates for the adoption of a new concept – decision-making autonomy– which prompts a reexamination of certain legal fictions underpinning our legal system, such as will and capacity, from an original angle. This concept also provides a structured and comprehensive framework for coherently addressing the contemporary challenges of consumer protection.